Le pâtre
- Pierre O. Desautourre
- 12 févr. 2022
- 2 min de lecture
XII
A l’arrivée de la nuit la poussière commence à se disperser. La promeneuse reprend le chemin du village. Les lumières dans les maisons s’allument et il y a la fumée qui sort des cheminées. L’odeur du bois de sapin brûlé se répand dans les rues et se mélange avec les arômes de repas du soir. On entend des rires, le bruit des assiettes qu’on met sur la table et les claquements de portes et de fenêtres. Enfin, la femme arrive et avec un dernier effort elle monte l’escalier pour entrer dans la cuisine de sa maison.
Avant d’entrer elle prend quelques bûches de bois pour allumer le feu dans le four. Comme tous les soirs, dans quelques minutes, selon son expérience, il n’y aura plus de courant et elle devra préparer son repas sur la cuisinière au bois qu’elle a dû installer après le refus de joindre la commune des étoiles. Le village n’avait plus accès au réseau extérieur et l’eau du lac de stockage était déviée dans une autre usine d’électricité. Dû à ces circonstances, il y avait des moments de pénurie et les ménages privés n’étaient plus desservis. Ces moments survenaient quand les unités d’ordinateurs dans l’entreprise de l'homme d'affaires tournaient à plein régime. Au début la commune essayait de fixer les heures où l’électricité sera à disposition de tout-le-monde. Mais cela ne fonctionnait pas. Les ordinateurs étaient gérés par des algorithmes qui les allumaient et les éteignaient selon le besoin du réseau électronique auquel ils étaient branchés.
En hiver, la pénurie altérait avec la fumée des cheminées et les gens se fiaient désormais à ce signe: quand la fumée sortait, il n’y avait plus de courant dans la bourgade et vice-versa. En quelque sorte c’était un nouveau langage, le langage des signaux et des faits. Un langage qui -primordialement- ne nous sert pas à parler mais à assumer, à assumer nos erreurs et l’erreur de l’isolement.
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